Vous avez déjà adopté un chien, un chat, un poisson rouge, un mec, et vous cherchez à vous diversifier ? La BnF vous propose la solution idéale…
L’Association des amis de la Bibliothèque nationale de France (AaBnF) lance l’opération « Adoptez un livre », à l’occasion du Salon du livre. La recette est expliquée sur le blog de Gallica :
« Le donateur est invité à choisir, sur le site de l’Association les ouvrages qu’il souhaite voir numériser.
Quatre thèmes ont été retenus pour l’ouverture : les femmes*, panorama du XIXe siècle, les livres de sciences naturelles, les grandes entreprises françaises. […]
En signe de reconnaissance, le nom du donateur figurera pendant 10 ans à côté de l’ouvrage numérisé, sur Gallica. »
* ndla : Vaste programme, n’est-ce pas ? Subtilement divisé sur ledit site en sous-thèmes, que je vous livre et dont je vous laisse méditer tout le sel : « Féminisme ancien – Féminisme moderne – Condition féminine – Modes et costumes »… Tant qu’à faire, pour charger la mule, ils auraient pu ajouter « Maternité et allaitement – Bijoux et maquillage – Cuisine et arts ménagers », je les trouve petits joueurs sur ce coup-là…
(mais tout s’explique : sur les 11 membres du Conseil d’administration, il n’y a que 3 femmes… Nos amies de La Barbe y trouveraient-elles matière à action…?)
Bref, devenons à nos moutons, à nos lynx et à nos poissons rouges. Adopter un livre, quel beau cadeau ! Justement, vous vous demandiez quoi offrir à votre poisson rouge adopté, voici le présent idéal, et cet ouvrage fraîchement numérisé (« quoi, elle est pas fraiche ma numérisation ???!!!??? ») apparaîtra bientôt dans Gallica avec la mention « Cet ouvrage a été numérisé grâce à Bubulle ».
La formule a été inaugurée il y a maintenant quelques temps par nos voisins anglais : la British Library a ainsi lancé « Adopt a book » , un programme de mécénat individuel ouvrant des avantages aux généreux donateurs (diplômes, visites personnalisées, etc.). Et ils nous proposent justement cette année une sélection d’ouvrages pour la fête des mères, plus d’hésitation…!
De même, mais avec un peu moins d’humour, les musées anglo-saxons font régulièrement et depuis longtemps appel au mécénat individuel pour l’acquisition ou la restauration d’œuvres d’art. Le Louvre s’y est mis depuis peu et avec succès, permettant l’acquisition au début de l’année 2011 des Trois Grâces de Cranach L’Ancien.
Eh bien, au delà des polémiques sur le financement public de la culture et d’une réticence franco-française au principe même du mécénat, je trouve que c’est franchement une bonne idée. Pas seulement pour l’aspect financier, mais tout simplement parce que cela permet à chacun de s’approprier un petit bout de culture.
Attention, séquence émotion.
Le père [ému, la gorge serrée]
– Regarde, fils, et lis, c’est grâce à ton vieux père que cet ouvrage a été numérisé.
Le fils [l’œil brillant]
– Oh, Papa, je suis tellement fier ! Moi aussi quand je serai grand j’adopterai un livre…
Fin de la séquence émotion, rangez vos Kleenex.
La conservation du patrimoine commun appelle alors à la citoyenneté, s’appuie sur la communauté. Cela nous rappelle que ce patrimoine appartient à tous.
Durant mes études à l’INP, il y a quelques temps déjà, j’avais été en stage pendant 2 mois aux Archives municipales de Barcelone où j’avais découvert avec intérêt le programme Barcelona Fem Memoria (en gros « Barcelone, construisons ensemble notre mémoire », ou quelque chose comme ça…), qui faisait appel non seulement aux dons d’argent mais aussi au volontariat des habitants/citoyens (« ciudadanos » en espagnol désigne à la fois les citadins et les citoyens, c’est un joli rapprochement). Dans le service d’archives de l’arrondissement d’Horta-Guinardo où je faisais mon stage, il y avait ainsi 2 retraités qui venaient chaque semaine aider au classement de la presse ancienne. D’ailleurs, nous n’hésitons aujourd’hui plus en France à faire appel au volontariat en ligne, à bénéficier de l’investissement et des compétences de nos usagers, en mettant en place des programmes d’indexation collaborative, pourquoi ne pas faire de même pour un bénévolat sur place ?
Bref, appeler à la participation des citoyens pour la préservation et la diffusion de leur patrimoine, que ce soit en fournissant un peu de leur temps ou un peu de leur argent, c’est peut-être un bon moyen non seulement de continuer à assurer nos missions dans un contexte économique contraint mais surtout de sensibiliser nos usagers à l’importance de ces missions et de les associer à leur défense.